Débat électoraux : tous les partis doivent-ils être invités?
Les médias sont-ils obligés de donner la parole à chaque parti pendant la campagne électorale ? La réponse est non, si l'on suit la décision rendue par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) qui a classé sans suite une plainte de Mischaël Modrikamen, président du PP, déposée en septembre 2018.
A l'époque, une télévision locale namuroise, Canal C, avait choisi de ne pas inviter un candidat du PP namurois à son débat électoral, estimant que les positions défendues par le PP allaient à l'encontre des principe d’une "société inclusive, égalitaire et ouverte". La chaîne avait souhaité "maintenir le cordon sanitaire" médiatique.
Le Parti populaire avait alors accusé Canal C, plainte à l’appui, d’avoir manqué à son devoir de pluralisme.
Pour le CSA, il n'y a pas la moindre infraction dans le chef de Canal C. "Les éditeurs disposent d’une marge d’appréciation dans la manière dont ils appliquent le règlement élections", précise Manon Letouche, secrétaire d’instruction du CSA dans sa décision.
Mais si cette position est juridiquement inattaquable, elle ne fait pas nécessairement l'unanimité au sein des rédactions des chaînes de télévision. Si BX1 et Notele sont sur la même ligne que Canal C, d'autres chaînes locales et RTL-TVI avaient pris le parti d'inclure des membres du PP sur les plateaux, lors des débats électoraux pour le scrutin communal 2018.
"Cette décision pourrait avoir un effet pour la campagne à venir. Pas seulement pour les télés locales, mais aussi pour tous les éditeurs audiovisuels", assure Baudouin Lenelle, directeur général de Canal C, qui se félicite de l'avis positif remis par le Conseil de déontologie journalistique (CDJ), qu’il a lui-même saisi sur ce même dossier, et qui renforce encore sa position.
Le CDJ a estimé qu’il n’y avait pas "d’automaticité entre le fait d’être candidat à une élection et celui d’accéder à l’antenne d’un média", soulignant ainsi la liberté d'appréciation des rédactions quant au positionnement idéologique d'un parti.
Selon Baudouin Lenelle, certains éléments programmatiques du PP le placent de facto "hors des limites démocratiques, avec une assimilation entre l’immigration, l’islam et l’insécurité". Pour lui, "cette question ne se pose pas pour le PTB".
Mischaël Modrikamen, le patron du PP n'a pas de mots assez durs pour qualifier ces décisions : il estime que "la démocratie est otage d’un cénacle autoproclamé de journalistes qui peuvent décider ce qui est bien ou non au niveau des idées". "La liberté d’expression, ce n’est pas que pour les idées qui font consensus, mais aussi celles qui braquent une partie de la population", conclut-il. "C’est de la censure et une attaque contre la démocratie."
(LpR/ Picture by Tim Mossholder on Unsplash)