Faut-il se préparer à une deuxième vague ... d'élections?
Le 26 mai dernier, les Belges se rendaient aux urnes. 360 jours plus tard, les négociations pour former un nouveau gouvernement sont dans l'impasse. Faut-il convoquer un nouveau scrutin? Et prendre le risque de réformes institutionnelles?
Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis le scrutin de mai 2019. Aujourd'hui, la crise sanitaire occupe tout l'espace politique et médiatique. Une nouvelle équipe dirigeante a été mise en place pour gérer la pandémie. Mais, le gouvernement de Sophie Wilmès ne peut pas s'appuyer sur une majorité parlementaire. Et la Première Ministre n'a pas caché qu'elle ne souhaitait pas prolonger les pouvoirs spéciaux au-delà du 26 juin, sauf situation tout à fait exceptionnelle. Mais que se passera-t-il ensuite?
"Sur le plan politique, on n’est pas beaucoup plus avancé qu’au lendemain des élections du 26 mai dernier", relève Jean Faniel, directeur du Crisp, dans un courrier hebdomadaire intitulé "La Belgique entre crise politique et crise sanitaire", publié avec Caroline Sagesser.
"C’est comme si la crise avait congelé les choses et que le dégel les avait fait réapparaître. Les rapports de force sont les mêmes, avec les mêmes difficultés", souligne-t-il, en indiquant que le gros point de crispation reste la possibilité ou non d'une alliance avec la N-VA.
"Sauf miracle, je ne crois pas qu’un gouvernement puisse se mettre en place rapidement", souligne Marc Uyttendaele, professeur de droit constitutionnel. "Le monde politique belge a été sauvé par le gong du coronavirus. Par contre, ce n’est pas un effet magique. Les problèmes qui existaient vont se poser à nouveau."
Un retour aux urnes est-il alors la solution la plus démocratique dans ce moment très particulier de notre histoire, où le coronavirus, l'arrêt de l'activité économique et les questions sociétales ainsi soulevées ont profondément changé la donne? "On est confronté à une crise économique et sociale, et en même temps à une crise politique. Il y a des raisons objectives de re-convoquer des élections, à la Chambre," estime Jean Faniel.
"On est face à un choix de société et il est important que les partis aient le courage de dire ce qu’ils veulent pour le monde d’après", estime Marc Uyttendaele. "Des projets inconciliables hier peuvent l’être demain. Notamment dans la réflexion sur l’État fédéral, un modèle à bout de souffle."
Mais changer de modèle ne nous oblige-t-il pas à revoir la Constitution? La crise sanitaire a en effet mis en lumière l'absurdité du système actuel avec des compétences très importantes (santé) parfois éclatées entre huit ministres, pour un état de 11 millions d'habitants. Faut-il alors envisager une réforme de l'état, un pari particulièrement risqué?
"L’enjeu essentiel sera le vote d’une déclaration de révision de la Constitution qui permette de rebattre les cartes. Il faut le faire avant les élections et voter en septembre. Cela ne mènera pas à la fin du pays. Mais à une refédéralisation de certaines compétences ; à des blocs homogènes et cohérents," juge Marc Uyttendaele
"Sur le plan démocratique, il n’est pas farfelu de re-convoquer des élections. C’est une solution qu’il faut réellement considérer. Pour en arriver à ce scénario, il faut toutefois trouver une majorité parlementaire disposée à dissoudre la Chambre. Or, certains partis craignent un revers électoral", conclut Jean Faniel.
(LpR - Source : La DH/picture : Unsplash )