Comment Abdeslam tente de se parer d'un manteau d'humanité
Le seul survivant des commandos ayant perpétré les attentats de Paris, Salah Abdeslam a enfin raconté le déroulé complet de sa soirée du 13 novembre, ou du moins sa version de l'équipée sanglante au cours de laquelle 130 personnes ont perdu la vie à Paris et Saint-Denis.
Après avoir affirmé à maintes reprises que sa ceinture explosive n'avait pas fonctionné, l'accusé soutient désormais avoir "renoncé" à se faire exploser par "humanité".
"Je vais m'expliquer parce que c'est la dernière fois que j'aurai l'occasion de le faire" a-t-il dit à l'occasion de son ultime interrogatoire au procès des attentats et donnant une nouvelle version des événements.
Pourquoi alors avoir refusé de répondre aux questions jusqu'ici, et avoir invoqué son droit à se taire lors des précédents interrogatoires?. "C'est parce que je ne me suis pas senti écouté", explique Abdeslam au président de la cour d'assises spéciale de Paris, Jean-Louis Périès.
Expliquant sa version des faits, il a tenté d'expliquer les doutes qui l'auraient saisi, le soir du 13 novembre. "Je vais rentrer dans ce café, je vais commander une boisson, je vais regarder les gens autour de moi et je me suis dit ‘Non, je vais pas le faire’", raconte-t-il.
"Je voyais les gens rigoler, danser, je comprends que j'allais pas le faire", indique-t-il pour justifier son renoncement, après lequel il aurait "repris la voiture" dans laquelle il avait conduit les kamikazes du Stade de France. "Je roule, je roule, je roule", mais son véhicule "tombe en panne".
"Avec une ceinture explosive, je suis cramé", explique Abdeslam, dans la suite de son récit. "Deux solutions s'offrent à moi : soit je rentre en Belgique, soit je vais jusqu'au bout et je me fais exploser".
Il aurait ensuite erré dans Paris, appelé "tout le monde" pour qu'on vienne le chercher et monte dans un taxi pour rejoindre le sud de Paris. Il jette sa ceinture dans une poubelle à Montrouge avant de retrouver deux "copains" belges à Châtillon (ses co-accusés) qui vont le ramener en Belgique.
Affirmant n'avoir rejoint le projet d'attentats à Paris qu'"au dernier moment", le 11 novembre 2015, et ne pas en avoir connu les détails, il soutient avoir uniquement su qu'il devait se "faire exploser".
"Mon frère (Brahim, qui mitraillera les terrasses, ndlr), il avait une ceinture, une Kalachnikov, je sais qu'il va tirer, je sais qu'il va se faire exploser mais je connais pas les cibles".
"Vous saviez que c'était des terrasses, une salle de concert ?", lui demande le président de la cour d'assises spéciale de Paris, Jean-Louis Périès. "Non", rétorque Abdeslam.
Et que penser alors de ses déclarations à ses proches, affirmant qu'il avait failli à sa mission car sa ceinture n'avait pas fonctionné ? "C'était un mensonge dont je n'ai pas réussi à me défaire tout au long de ma cavale. Alors, je l'ai pris comme une réalité", affirme-t-il.
Mais "j'ai renoncé par humanité, pas par peur", affirme Salah Abdeslam dans la suite de son interrogatoire, qui reprendra ce jeudi, en deuxième moitié d'après-midi.
(FL avec AFP/Picture : Twitter)