Le gouvernement va-t-il attaquer Electrabel?
Le Premier ministre, Charles Michel, et la Ministre de l'Énergie, Marie-Christine Marghem vont-ils demander à Electrabel, comme ils en ont affiché l'intention, d'indemniser les consommateurs pour l'augmentation des prix de l'électricité sur les marchés de gros, une hausse consécutive aux déboires de nos centrales nucléaires ?
L'idée fait évidemment bondir le CEO d'Electrabel, Philippe Van Troeye, qui repousse par avance toute idée d'indemnisation, Electrabel étant selon lui la première victime de l'indisponibilité de ses centrales.
En attendant, Charles Michel a commandé un rapport à la Creg, le régulateur fédéral du secteur de l'énergie, afin de déterminer "l'impact sur les prix de l'indisponibilité des centrales nucléaires en Belgique". Un document qui a pu être consulté par La Libre.
Le rapport montre que le pic de l'augmentation des prix de l'électricité a été relevé dans les derniers jours du mois de septembre, lorsqu'on a appris que Tihange 2 et 3 seraient indisponibles tout l'hiver. La Creg relève que, fin septembre, les prix de gros pour une livraison en novembre ont grimpé à 204 euros par MWh sur l'un des marchés de l'électricité. Depuis, les prix de gros sont revenus à la normale grâce aux différentes mesures annoncées.
Pour bien comprendre ce dossier, il faut noter que les prix de gros ne sont pas directement et automatiquement corrélés avec ce qui apparaît sur votre facture d'électricité. En revanche, ils servent d'indice de base pour l'indexation des contrats variables et pour les tarifs des nouveaux contrats fixes.
Pour évaluer l'impact concret sur les prix de l'indisponibilité du parc nucléaire, la Creg a calculé l'évolution de la composante énergie payée par les consommateurs. Résultat, entre septembre et octobre, le prix de la composante énergie a grimpé de 38,8 % pour un ménage moyen. On est ainsi passé d'un prix annuel de 237 euros à 327 euros hors TVA.
Du côté de la facture des PME, la Creg pointe une hausse du coût de la composante énergie de 28,25 % : de 3 353 à 4 300 euros. Une hausse bien plus marquée que dans les pays voisins, selon la Creg.
Ce qui ne veut pas dire pour autant que la facture d'électricité des ménages et des PME a uniformément augmenté en octobre. Rappelons que la composante énergie des formules fixes est "verrouillée" durant toute la durée du contrat.
Quant aux contrats variables, il existe une grande diversité des paramètres d'indexation. Mais une chose est certaine, tous les fournisseurs utilisent des paramètres "présentant un lien clair avec les marchés de gros", note la Creg.
Il reste à voir si Charles Michel et Marie-Christine Marghem pourront utiliser ce rapport pour attaquer Electrabel. Certains spécialistes du secteur en doutent. Mais d'autres estiment qu'une arme juridique originale pourrait être trouvée.
Reste que certains commencent à être sérieusement agacés par l'incurie d'Electrabel, qui a une fâcheuse tendance à reporter sur les consommateurs les conséquences de ses propres manquements...
(LpR - Source : La Libre/Picture : Belga)