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Né un 12 janvier : Blixa Bargeld (Einsturzende Neubauten) magnifiquement insaissable

Tentez l ‘expérience autour de vous. Très peu de gens connaissent le nom de scène de ce génial olibrius né à Berlin en 1959. Et encore moins son véritable patronyme pour l’état-civil : Christian Emmerich. Mais ceux qui l’apprécient lui vous souvent un culte acharné…

   Attardons-nous d’ailleurs un instant sur ce pseudonyme qui n’a rien de fortuit ni d’anodin. Adopté en hommage à Johannes Theodor Baargeld, une des figures tutélaire du dadaïsme, il signifie également "argent liquide" en langue allemande.

  En 1980, quelques mois après que David Bowie ait clôturé sa trilogie berlinoise, il porte Einstürzende Neubauten sur les fonts baptismaux dans cette ville encore balafrée par un mur séparant l’Est et l’Ouest. Le nom du groupe pourrait être traduit par "nouveaux bâtiments qui s’effondrent". Et de fait, quelques mois après les premières prestations du groupe, le toit du Palais des Congrès berlinois (symbole de l’aide américaine à la reconstruction du pays) s'écroule. Le groupe obtient ainsi une attention inespérée et, avec son allure d’échalas un peu terrifiant, Blixa est rapidement vu comme un oracle maléfique. Volontiers bruitiste et foncièrement dissonante, la musique des Neubauten tape (littéralement) sur tout ce qui passe à sa portée : plaques de métal, outils de chantier et objets divers. Quarante-cinq ans plus tard, le groupe ne cherche toujours pas à séduire à tout prix mais leur alchimie sonore hétéroclite évoque désormais plus un jazz d’avant-garde sans oeillères. Sorti en 2024 et sous-titré "alien pop music", leur dernier album "Ist Ist" en apporte une preuve magistrale. Ou comment séduire en refusant tout compromission…


  Chef d’équipe des Neubauten à la discographie aussi pléthorique (une quinzaine d’album)s) que capricieuse, Blixa Bargeld vit aussi un nombre indéterminé d’autres existences artistiques. Si vous appréciez Nick Cave, vous vous souvenez peut-être qu’il fut guitariste des Bad Seeds entre 1983 et 2003. On peut d’ailleurs déceler sa patte sur l’album "Your Funeral, My Trial". Il a aussi collaboré à plusieurs reprises avec l’artiste italien Teho Teardo (du groupe Melthead) et c’est un plaisir d’entendre Blixa psalmodier "Mi scusi" ou "Bisogna morire" dans la langue d’Adriano Celentano. Les deux artistes ont encore enregistré le très beau "Christian & Mauro" (leurs deux vrais prénoms) en 2024.


  Mais comme Blixa ne peut décidément pas rester en place, on retrouve aussi son empreinte sonore sur des installations  vidéo ou des pièces de théâtre. "Flammenwerfer", la dernière en date aussi en 2024, relate la vie de l’artiste suédois Carl Frederik Hill. Insatiable et toujours aussi passionnant à l’âge vénérable de 66 ans, Blixa Bargeld n’a aucune intention de prendre bientôt sa retraite. Et, comme il n’est pas dénué d’humour, il a même prêté sa voix à une publicité pour les magasins de bricolage allemands Hornbach !
  

(AK - Photo : © Etienne Tordoir)


Photo : Blixa Bargeld (à gauche) avec Einsürzende Neubauten aux Halles de Schaerbeek à Bruxelles (Belgique) le 20 février 1986

AK

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Journaliste @tagtik FR - Music, cullture, festivals

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