Soja, la face cachée d’un aliment tendance
Cette plante de la famille des légumineuses fait fureur dans nos supermarchés. Attirant végétariens, intolérants au lactose, sportifs sous régime particulier et bien d’autres, le soja déploie ses atouts pour mieux vanter ses pouvoirs sur la santé. Baisse du taux de cholestérol, diminution des symptômes de la ménopause, prévention des maladies cardio-vasculaires et des cancers, ses bienfaits semblent foisonner. Une question se pose alors : le soja est-il vraiment un miracle végétal, un super aliment pour l’organisme ? Eclairage.
La tendance ‘soja’ nous vient d’Asie et a été largement répandue dans le monde entier avec la croissance du végétarisme. Les prétendues vertus de ce végétal sur la santé ont rapidement inondé les esprits attentifs à leur corps et les amateurs de substituts alimentaires moins gras, plus riches en protéines et moins onéreux.
« Entre 1990 et 2019, la production mondiale de soja est passée de 108 à plus de 340 millions de tonnes, selon la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture). » reprend le Vif l’express. Et cela n’a rien de surprenant. Avec le temps, de plus en plus d’éleveurs ont pris conscience du faible coût d’une nourriture à base de soja pour les animaux, l’élevage intensif a explosé et les régimes alimentaires alternatifs ont fait leur place partout dans le monde. Le problème soulevé alors par la journaliste Julie Lotz, trouve son origine dans le manque d’informations livrées au consommateur sur le produit qu’il achète. En effet, manger du soja, contrairement à ce que nous pourrions croire, n’est pas seulement un choix. Les étiquettes collées aux aliments courants que nous trouvons au supermarché (donuts, boulettes de viande, saucisses en bocal, nuggets de poulet,…) indiquent, la plupart du temps, la concentration de soja présente dans la préparation mais l’acheteur n’en analyse la composition que très rarement. Conclusion, il ne peut se rendre compte que, tous les jours, il ingère une ou plusieurs doses de soja. La consommation se fait de manière inconsciente et surtout, rien n’informe sur les risques qui y sont liés.
Le soja contient des phyto-œstrogènes, « soit des molécules - aussi appelées isoflavones - ressemblant tellement aux hormones féminines qu'elles sont capables de mimer leur mécanisme d'action. Des perturbateurs endocriniens, donc. » épingle encore le Vif. C’est en prenant part à une petite expérience inspirée par la chercheuse française Catherine Bennetau-Pelissero, que Julie Lotz a décidé de coucher sur papier, dans son livre ‘Planète Soja’, les dangers induits par la surconsommation de cette plante « merveilleuse ». Après s’être enfilé un litre de lait de soja, d’une traite (ou presque), la journaliste et chercheuse a vu ses menstruations débarquer 4 jours avant la date prévue. Cette arrivée prématurée, Julie Lotz l’explique par l’ingestion d’une quantité importante de lait. Celle-ci aurait provoqué une montée en puissance d’œstrogènes, similaire à ce qui se prépare dans le corps de la femme quelques jours avant le début des règles. Afin de rendre l’expérience plus applicable et réaliste, elle compare le litre de lait de soja à l’addition d’« un steak, un dessert et un verre de jus » tous à base du végétal en question. Le taux d’isoflavones est identique dans les deux cas. Cette combinaison, plus vraisemblable, pourrait tout à fait correspondre au repas du soir de n’importe quel individu. Le soja, loin d’être un aliment innocent, nécessite une prescription médicamenteuse en raison des œstrogènes qu’il contient et doit, par conséquent, être considéré comme un « alicament ». Son utilisation doit suivre des recommandations précises, émanant d’un professionnel, et un dosage adapté.
« Les proportions quotidiennes maximales préconisées par l'Afssa (Agence française de sécurité des aliments) : 80 mg d'isoflavones par jour chez un homme de 80 kilos, 60 mg chez une femme de 60 kilos. » continue le Vif. Comme relaté précédemment, le souci réside dans le manque de communication claire des étiquettes qui ne font pas l’objet d’une attention particulière puisque personne ne peut se douter qu’il traine une certaine quantité de soja dans des produits courants tels que le hachis ou encore le cake aux pommes. De plus, la méthode industrielle de production qui consiste à broyer les graines sous une température élevée, « augmenterait même la teneur en phyto-œstrogènes. ». Beaucoup d’autres études scientifiques mettent en garde contre les risques entrainés par une surconsommation de soja. A haute dose, cette plante pourrait nuire à la production de spermatozoïdes et provoquer la stérilité de l’homme mais également de la femme. Les isoflavones auraient un impact négatif sur la thyroïde. Il est donc vivement déconseillé à toutes les personnes touchées par l’hypothyroïdie d’en consommer. La Fondation contre le cancer quant à elle, proscrit la consommation de soja sous forme de compléments alimentaires pendant la grossesse et l’allaitement mais aussi pour toutes les femmes atteintes de cancers hormonodépendants du sein, de l’utérus ou des ovaires. Il semblerait que le soja nuise à l’efficacité de certains traitements et conduise à une aggravation des cancers, notamment celui du sein.
Au vu de toutes ces problématiques et des conclusions recensées par un grand nombre de scientifiques sur le sujet, le soja représente un danger pour qui en consomme en trop grande quantité, malheureusement sans toujours en avoir conscience. Un changement doit donc s’opérer en matière d’emballages et de prévention sous peine de voir cette plante bienfaisante se transformer en pire ennemi.
(Anne-Sophie Debauche - Source : Le Vif/L'Express - Illustration : Pixabay - bigfatcat)