La carte-cadeau sous le sapin a un parfum d’arnaque
Des millions encaissés qui ne profiteront à personne. C’est le bilan de nombreux chèques-cadeaux proposés aux anniversaires, départs à la retraite, à Noël ou lors des fêtes de fin d’année. La raison : la date limite d’utilisation.
La date limite d’utilisation ou l’échéance. Voilà la mauvaise surprise pour de nombreuses personnes au moment d’utiliser le bon, la carte ou le chèque-cadeau reçus à Noël, lors d’un anniversaire ou d’un départ en retraite, voire comme prime. Ils ont été oubliés dans un tiroir ou sur le tableau magnétique. Quand le franc tombe, en se présentant chez le commerçant ou la société de services avec la carte-cadeau, le bénéficiaire apprend que c’est trop tard. Et il est bien souvent difficile, voire impossible, d’obtenir une prolongation. Un geste commercial qui serait le bienvenu, surtout pour les bons émis au sein d’une boutique ou d’une chaîne de magasins. Car, en soi, l’argent a déjà été encaissé, lorsque celui qui a choisi ce « cadeau » l’a payé avant de le glisser dans une enveloppe (ou dans la chaussette près du sapin).
Des millions dans la nature
Peu de pays ont réglé ce problème d’échéance à court ou moyen termes. Laquelle permet aux émetteurs de toucher des millions d’euros chaque année sans avoir à fournir un produit ou un service en échange. En effet, en Belgique, avec ses presque 12 millions d’habitants, la valeur marchande de plusieurs dizaines de millions d’euros issus de chèques-cadeaux n’est pas réclamée chaque année. La dernière étude, datant de 2010, avait évalué cette somme à 70 millions. Et à l’époque, il n’y avait pas autant de chèques et bons cadeaux que 14 ans plus tard ! En France, 20 % des chèques-cadeaux émis comme prime aux salariés sont perdus ou périmés en 2024… Une montagne de cartes devenues inutiles et payées pour du vent (et du carton). D’autres pays ont réglé ce problème, avec plus ou moins de pertinence.
Durée variable
La Suisse a légiféré en la matière en imposant un délai de 5 ans ou 10 ans selon les services proposés. Même si certains n’hésitent pas à limiter la durée d’utilisation de leurs cartes ou box à 3 ans ! Au Canada, protégeant bien ses consommateurs, seuls certains types de services sont « périssables ». Les cartes-cadeaux sont donc théoriquement sans expiration. En France et en Belgique, il n’y a pas de délai fixé. Le bon est considéré comme étant à durée illimitée, sauf s’il y a une date d’échéance « raisonnable ». À savoir, bien souvent, 1 an après la date d’achat. C’est donc généralement ce délai qui est choisi par de nombreux émetteurs (sans blague ?). Néanmoins, par souci d’honnêteté intellectuelle, certaines chaînes ont la politesse d’être plus généreuses en offrant 2, 5 ou 10 ans d’office, voire sans limite, dans les pays sans délai « obligatoire ». Cependant, en cas de faillite de l’émetteur ou du vendeur, la carte-cadeau est définitivement perdue. En outre, il est rarement possible (pour ne pas dire impossible) de se la faire rembourser en cash !
Parfum d’escroquerie
Bref, dans beaucoup de pays, compte tenu de l’oubli et de la procrastination d’une grande partie des bénéficiaires, voire carrément de leur perte, ces cartes-cadeaux sont souvent un cadeau pour les émetteurs dans les pays sans législation restrictive. Ils encaissent ainsi des dizaines de milliers d’euros, voire beaucoup plus, sans ne devoir rien offrir en retour. Légalement. La belle arnaque ? Et si plutôt qu’une carte-cadeau, vous achetiez une carte « postale » pour y laisser un joli petit mot tendre accompagné d’un ou de plusieurs billets de banque à validité illimitée, eux. En plus la personne concernée pourra choisir ce qu’elle veut sans obligation d’aller faire un spa, d’acheter du parfum ou des fringues, de regarder des séries, de commander en ligne ou de s’encombrer d’électroménager superflu.
* Photo d’illustation – Zalando offre 5 ans de validité minimum
(Olivier Duquesne – Source : NIBC, Rhône FM, Pluxee, Office de la protection du consommateur au Québec – Picture : © picture alliance / Eibner-Pressefoto | Fleig / Eibner-Pressefoto)